Le problème de l'utopie
Le présent texte a été rédigé comme
réponse à cet article.
Vous espérez et cherchez à construire un monde meilleur,
un monde idéal, un monde beaucoup plus juste, prospère,
un monde de vérité, un monde où les gens seraient
bien plus heureux, où leurs actions iraient dans le sens de
l'intérêt de tous, dont le respect de l'environnement,
plutôt que dans le sens du parasitisme.
Ca tombe bien, moi aussi.
Et vous êtes désespérés d'y arriver.
Pas moi. En effet, j'ai trouvé la solution, je l'ai
déjà exposée à un grand nombre de personnes
(étudiants en sciences économiques et politiques) et
après discussion la plupart d'entre eux ont été
convaincus.
Ce n'est même pas difficile à mettre en place, du moins
beaucoup moins que beaucoup d'autres choses qui ont été
accomplies dans le monde ne serait-ce que par des organisations
caritatives. Il suffirait de s'y mettre à deux ou trois, et en
quelques années le monde entier sera changé.
Problème: je suis seul. Je n'y passe pas beaucoup de temps, je
paie d'autres personnes pour s'en occuper, mais ça
traîne... si seulement je trouvais 2 ou 3 meilleurs contacts
sérieux et motivés, ça pourrait enfin
s'accélérer. Des milliers de gens ont été
convaincus que ça doit marcher, mais personne n'a le temps ou
les compétences pour s'en occuper.
Mais, des gens qui pensent comme vous, appellent de leurs voeux un
monde meilleur, il y en a des millions. D'ailleurs, qui ne souhaite pas
un monde meilleur ? Ca existe ça ? Oui, une minorité de
politiciens et dirigeants industriels corrompus. Mais comment
pouvez-vous prétendre que tous les malheurs du monde sont de la
faute de cette minorité ? Je ne le pense pas.
Et tous les millions de gens qui aspirent à un monde meilleur,
et qui pour beaucoup d'entre eux y consacrent une grande
énergie, n'aboutissent à rien. Ne trouvez-vous pas cela
bizarre ? Qu'est-ce qui empêche donc, par exemple, ces millions
d'utopistes d'ignorer simplement les gens de pouvoir et de se regrouper
pour construire leur société idéale entre eux dans
leur coin, échappant au contrôle de ceux-ci ?
Eh bien, voici la réponse : parce qu'ils ne savent pas comment
faire. Ils n'ont pas compris d'où viennent les problèmes,
quelle est la cause des injustices, et encore moins comment un monde
meilleur pourrait fonctionner.
Car le problème est que pour faire un monde meilleur, il ne
suffit pas de le vouloir. LE problème est de concevoir comment
il peut effectivement fonctionner en pratique pour pouvoir subsister,
et devenir réellement, concrètement, ce monde meilleur
espéré.
Faute de savoir ce qu'on veut construire et comment ça peut
effectivement fonctionner, on a beau rêver, se plaindre, aimer
son prochain, pester contre les corrompus qui nous gouvernent,
descendre dans la rue par millions, cela ne sert à rien.
Même si on est de plus en plus nombreux à le vouloir,
même 99%, cela n'avancerait à rien. En effet, encore une
fois, si cela pouvait avancer à quelque chose d'être
nombreux, on pourrait facilement arriver au même résultat
sans l'être : il suffirait de se regrouper ensemble sur un
même territoire pour devenir sur ce territoire aussi majoritaires
qu'on le veut. (Remarque: les anarcho-capitalistes échappent
à cette critique dans la mesure où ils ne sont d'abord
même pas assez nombreux pour pouvoir se regrouper quelque part au
point d'y devenir majoritaires, ensuite ils ont au moins l'intelligence
de chercher activement à le faire).
Alors, d'où vient le problème ? C'est que le
fonctionnement du monde, de n'importe quel monde dont en particulier
celui d'un monde meilleur, comporte un minimum de complexité
qu'il est nécessaire d'appréhender. Or, la plupart des
utopistes sont soit incapables soit négligents, face à ce
problème. Ils ne savent que pester contre le monde actuel qu'ils
ne comprennent pas, et raisonner en termes de slogans: soyons pleins
d'amour (comme si les autres ne l'étaient pas), soyons
nombreux... sans réfléchir à quoi cela pourrait
effectivement servir concrètement. Ou encore, bien sûr,
c'est la faute des autres, des grands méchants capitalistes et
hommes de pouvoir.
Bon alors, parlons un peu de puissance. Croyez-vous sérieusement
que le monde soit régi par la loi du plus fort ou du plus grand
nombre, et que les malheurs viennent des vilains méchants qui
ont le pouvoir ?
Je ne suis pas d'accord.
Voici quel est, à mon sens, le problème fondamental du
monde.
Le problème est qu'il est complexe, et qu'il faut beaucoup
d'intelligence pour l'appréhender.
Ainsi la science est née assez récemment, et a
bouleversé le monde. Elle a rendu l'homme extrêmement plus
puissant qu'il aurait jamais pu être sans elle. La science, c'est
l'intelligence de la complexité. Celle des lois de la physique
d'abord, et de beaucoup de choses ensuite. Et plus la science se
développe, plus le monde se complexifie; chaque éclairage
apporté par la science permet d'aller de l'avant, de
développer le monde et d'agrandir le monde des connaissances
qu'il serait nécessaire d'acquérir pour
appréhender le monde qu'on est en train de construire.
La science est partout et gouverne tout, mais la plupart des gens
l'ignorent. Les scientifiques, minoritaires et divisés en une
foultitude de spécialités, jouent un rôle capital
pour continuer à développer l'économie pour la
prospérité de tous. Sans la science, le monde n'aurait
jamais pu accéder à l'état de confort que nous
connaissons, et
auquel il serait absurde, sauf pour quelques moines, de vouloir
renoncer.
Or, si la science est indispensable pour produire le
moindre des objets de notre quotidien, pourquoi voudriez-vous la
considérer comme superflue face au problème le plus
crucial et général de tous, celui de l'organisation
d'ensemble de la société et de tous les systèmes
productifs ?
Donc, c'est en tant que scientifique et suivant une démarche
théorique, condition indispensable qui n'a jamais
été accomplie assez sérieusement jusqu'ici, que
j'ai conçu mon projet d'un monde
meilleur. Ainsi, toute quête utopique dont la démarche
ne se fonde pas sur une intelligence et une démarche de
théorisation véritablement scientifiques sera
nécessairement une impasse.
Bon, il faut dire que les théoricien du passé avaient une
excuse: ils n'avaient pas internet, or ce meilleur système que
j'ai conçu ne peut fonctionner qu'à l'aide d'internet.
Car Internet est le seul moyen possible pour traiter logiquement et en
temps réel les données nécessaires au
fonctionnement d'un système qui puisse enfin être logique.
Ensuite, concrètement: le problème des utopistes, qui
hélas pour la plupart d'entre eux n'ont pas la compétence
indispensable pour pouvoir traiter correctement le problème dont
ils ont la prétention de parler, est donc qu'ils analysent les
choses complètement de travers. Leur quête d'un
monde meilleur consiste traditionnellement à pousser le monde
dans la direction diamétralement opposée de la seule
direction dans laquelle ce monde meilleur aurait réellement une
chance de se trouver. A savoir, qu'ils poussent le monde dans la
direction de la non-science, de l'incompréhension, de la
destruction de la main invisible, des
choses qui fonctionnent correctement et qui ont
quelque chose de juste et de pertinent, alors que la construction d'un
monde meilleur nécessiterait au contraire une meilleure science,
une meilleure compréhension, justesse, exactitude, afin de
compléter ce qu'il y a de juste et de pertinent par ce qui
manque encore, d'encore plus juste et pertinent. Ils sont
résolument décidés à employer les
méthodes de l'échec, et à accuser le reste du
monde des effets de leur propre
incompétence.
Ainsi ils accusent et rejettent le
libéralisme, alors que le libéralisme est indispensable
à la construction d'un monde meilleur. Car logiquement aucun
monde ne peut fonctionner proprement s'il n'est pas libéral. Il
n'y a qu'une seule alternative au libéralisme ailleurs que dans
les rêves incohérents de tous ces utopistes
incompétents: c'est la dictature totalitaire. Car il n'y a pas
de liberté individuelle possible sans libéralisme
économique, de sorte que toute alternative au libéralisme
est une alternative à la liberté, et donc une dictature
totalitaire. Bon, cette remarque a l'air simple, en fait la logique est
très profonde et ceux qui croient y trouver des
échappatoires n'ont en fait pas compris, mais ce n'est pas
forcément facile à expliquer. L'erreur est
traditionnelle. Déjà l'Utopie de Thomas Moore
prétendait décrire un monde idéal, et en fait,
cohérence oblige, il s'agissait déjà d'un
système totalitaire. Or, le totalitarisme n'a en fait rien
d'idéal. Mais les gens n'ont pas titlé. Ils continuent
à rêver d'un monde idéal en forme de totalitarisme
sclérosé.
Ainsi, les communistes utopistes russes du début du 20ème
siècle étaient bien résolument
décidés à construire un monde meilleur contre le
pouvoir de l'argent, ils étaient majoritaires, pleins des
meilleures intentions, ils étaient finalement les plus forts
contre les pouvoirs du tsars et des propriétaires, et ils ont
réussi... à instaurer l'horreur absolue.
Or, dans le système économique, très nombreuses et
profondes sont les sciences indispensables à la fabrication de
chaque produit particulier... mais le système économique
et politique dans son ensemble qui contrôle tout cela, demeure le
maillon faible relativement le moins scientifique de tous.
Néanmoins
très scientifique relativement au d'intelligence de la
plupart des utopistes, les projets de ces derniers
représenteraient une relative régression du niveau de
scientificité du système par rapport à ce qui
fonctionne actuellement, et donc ne pourraient mener qu'au chaos
et à la misère à toute tentative
d'implémentation de leurs lubies
à grande échelle.
Non. Le seul moyen de possible de faire un monde meilleur, c'est
à l'aide d'un effort d'intelligence qui surpasse encore en
scientificité le système politico-économique qui
existe actuellement, pour l'élever enfin à un niveau un
tant soit peu comparable à celui des autres sciences qui ont
réussi.
Mais qu'on se rassure: comme pour toutes les technologies,
la science est indispensable, mais il n'est pas nécessaire
que tout le monde y accède pour profiter de ses fruits. Il
suffit qu'une minorité comprenne et développe la
technologie, pour pouvoir en offrir les fruits à tous.
Encore une remarque: pour répondre à la frayeur gauchiste
classique qui présente la libéralisation de
l'éducation comme une menace pour la démocratie alors que
l'éducation publique serait une arme de résistance du
peuple: même si ça a pu être autrefois en ce sens,
désormais depuis pas mal de temps c'est exactement le contraire:
l'Education Nationale est l'arme de l'Etat pour zombifier la population
et l'empêcher de penser librement. Car, faut-il le rappeler, la
véritable condition de libération du peuple face au
pouvoir des tyrans n'est pas que tout le monde ait un certain niveau
d'éducation égal (nivelé par le bas faute de
pouvoir le faire par le haut, ce qui mène donc à un
système sclérosé et donc demeurant dans
l'injustice
aux mains de quelques gouvernants qui ont seuls les moyens de
contrôle face à la complexité croissante du monde),
mais qu'une certaine petite minorité significative de gens les
plus doués, parmi
laquelle se trouvera forcément des gens biens, ait la
liberté de réfléchir suffisamment loin, plus loin
que la médiocrité ambiante qui nous gouverne et de
laquelle la plupart des gens n'ont de toute manière pas les
capacités naturelles de sortir, pour
accomplir les oeuvres nécessaires libératoires de tous,
qu'aucune majorité même écrasante ne pourra
accomplir (en effet la
majorité n'a de toute façon génétiquement
pas les capacités suffisantes: une
bonne oeuvre d'intelligence est une oeuvre originale, qui n'a pas
besoin d'être répétée par un grand nombre de
gens, donc qu'une bonne minorité compétente serait la
mieux placée pour accomplir, du moins si elle se trouve dans un
espace de liberté lui permettant d'en faire profiter les fruits
à tous).
Libéraliser l'éducation, selon moi, c'est l'offir enfin
gratuitement à tous et de manière adaptée à
chacun, en bien meilleure qualité, et en laissant les
élèves libres d'apprendre ce qu'ils veulent. Or
l'Education Nationale actuellement conçue, c'est le contraire:
elle est conçue pour accaparer
le temps des élèves en leur dictant tout le programme de
ce qu'ils doivent apprendre, en les privant des moyens de
développer leur esprit et leur initiative; et en
déresponsabilisant le choix de leur cursus par son
système d'inscriptions et de diplômes d'Etat par lesquels
il suffit aux jeunes de s'inscrire à une fac, d'en apprendre les
cours et d'en passer les diplômes, pour se donner l'impression
d'être en train de s'instruire sans se poser davantage de
questions sur la raison d'être de tout cela.
Mais il n'y aurait en réalité pas besoin de
dépenses publiques importantes d'enseignants
physiquement présents et travaillant pour des étudiants
en
particulier, pour que ces étudiants puissent
véritablement s'instruire. Il
suffirait en effet à ces dernier de s'instruire de chez eux
à l'aide de documents trouvés sur internet.
Sur Internet, il y a tout ce qu'on veut gratuitement. Donc,
l'éducation libéralisée, où chaque
étudiant est libre de chez lui de s'instruire de tout document
qu'il veut, ça sera gratuit pour tous, aussi bien pour l'Etat
que pour les étudiants, et d'infiniment plus grande
qualité pour tous, que le système public actuel.
Bien sûr direz-vous, il faut bien quelques professeurs pour
concevoir et mettre en ligne les documents. Mais, outre que
déjà il y a largement de quoi faire et que nombreux sont
ceux qui (comme moi) spontanément choisissent d'alimenter cette
somme gratuitement, il est également clair que s'il fallait
payer les professeurs pour le faire, soit par l'Etat, soit par libres
dons des utilisateurs, ça serait facile et extrêmement
moins cher que le système éducatif actuel.
Bon, pour compéter cette réflexion et les argumentaires
indispensables: voir mes autres textes
philosophie morale
Les principe du fonctionnement d'un monde meilleur
Le projet logiciel qui vise à servir
de point de départ à ce dernier
critique de la gauche
critique du communisme
La volonté de Dieu
Un monde scientifique ?
Pour la liste complète de mes textes: sommaire opinions
Lien extérieur: Nouvelle
Société, un projet différent du mien, du genre
réforme profonde des institutions pour remettre à neuf
autant que possible les concepts traditionnels de démocratie
(tandis que je propose un changement de paradigme beaucoup plus
radical) ; ce n'est pas vraiment dans ma ligne de pensée mais je
le trouve néanmoins intéressant à citer parce
qu'il a au moins le grand mérite d'être intelligent,
contrairement à tant d'autres utopies qui circulent par ailleurs.