Remplacer les droits d'auteur par un système libre
rémunération
Thèse
Une fois une oeuvre livrée au public, qui se la procure et en
profite gratuitement ne nuit à personne, il n'y aurait donc
logiquement aucune raison qu'il ait à payer quoi que ce soit.
Oui mais en un autre sens il en profite, et si tout le monde en profite
ainsi gratuitement, l'auteur a dépensé ses efforts, le
monde en a profité et ne l'a pas remercié, ce qui n'est
pas juste.
En un autre sens on peut considérer le droit d'un auteur
à composer une oeuvre sans la livrer au public, mais seulement
à des gens qui le paieront pour cela: cela ne doit pas
déranger le public qu'un auteur compose une oeuvre sans la leur
livrer, et cela ne devrait donc pas être interdit.
En ce domaine on ne peut pas trouver une solution entièrement,
parfaitement logique.
Voir quelques réflexions pragmatiques plus approfondies que j'ai
écrites à ce sujet par
ici, permettant d'esquisser une approche de solution qui me semble
souvent la moins mauvaise. Voir aussi d'autres idées de solutions:
- Une idée générale (en anglais)
- Une proposition
de solution adaptée au financement de la recherche-développement en
technologies moins polluantes
Regardant la liste des points du programme du parti pirate, voici mes
commentaires:
1. La libre circulation des informations sur Internet. : OK
4. Le droit au partage libre et sans contraintes de toutes les oeuvres
numériques: OK
5. La suppression de la taxe sur les supports vierges : OK
Au sujet de 3. Le droit complet à l’anonymat sur Internet, et 6.
La
gratuité d’accés à Internet : pas clair, ça
n'a pas beaucoup de sens, c'est une affaire de développement
technologique, qui ira au rythme de ce que permettent les innovations
technologiques, je ne vois pas ce qu'une décision de l'Etat peut
avoir à faire là-dedans. En particulier, sur une
éventuelle "gratuité" financée pour les
impôts, je ne trouve cela défendable que si le coût
final est bien réduit (par économies d'échelles ou
autres).
Sur l'anonymat, on peut se dire
qu'il faut aussi certaines limites, notamment pour pouvoir lutter
contre le spam. Et puis, le besoin absolu d'anonymat n'a à mon
avis vraiment de sens que dans un contexte paranoïaque dans lequel
l'Etat serait mauvais et voudrait opprimer par la force les pauvres
défenseurs des libertés. Or, il vaut mieux à mon
sens se concentrer sur les moyens de démocratisation de la
politique et de lutte contre les abus de pouvoir au niveau même
du système politique, ce qui est la cause première des
principaux problèmes, que de vouloir limiter en aval les moyens
d'actions d'une autorité publique finalement reconnue avec
résignation comme monstre éternellement illégitime.
2. L’abolition du droit d’auteur sur le terrain électronique
(i.e. ce qui ne concerne pas les publications sous forme papier),
à remplacer par le droit de paternité, i.e. que sur toute
copie d'une oeuvre il y ait la référence correcte de
l'auteur, permettant au lecteur de lui faire un don (lorsque le
paiement en ligne sera facile), soit : d'accord, mais on fera
exception dans un premier temps (en attendant de voir comment le
changement fait ses preuves ailleurs) des oeuvres et logiciels à
usage professionnel invisible au consommateur final.
Il me semble juste de réduire la rémunération des
auteurs à des
dons volontaires de la part des consommateurs. En voici les raisons
Argumentaire
On dit que la licence GNU est aussi une
forme de droit d'auteur dont le
respect est indispensable. Oui mais sa principale raison d'être
légale est justement sa résistance à l'autre droit
d'auteur (autrement dit, le fait de ne pas pouvoir être soumis
par quelqu'un d'autre à un copyright commercial). Donc si ce
dernier est aboli de manière globale, il n'y aura plus vraiment
besoin d'une loi spécifique pour défendre le copyleft. Il
reste la question de la paternité morale à respecter.
Bon, ça devrait pouvoir se faire sans trop de
difficultés...
Techniquement, il est nécessaire d'avoir une démarche
globale et
cohérente de l'ensemble des droits et d'éviter toute
complication technique qui risquerait de plomber le fonctionnement de
beaucoup de choses et d'entraver les libertés.
La plupart (en proportion) des
bénéficiaires des "droits d'auteurs" et autres droits de
brevets sont en réalité
- des éditeurs voleurs des droits
d'auteur que les lois sur les droits
d'auteur défendaient jusque-là en privant les auteurs de
leurs droits.
- multinationales et
industriels aux diverses pratiques commerciales pas du tout
honnêtes
dans leur ensemble, et ne méritant donc nullement quelque
protection supplémentaire de la puissance publique que ce soit.
La pratique du droit d'auteur ayant dévié bien trop
longtemps, serait bien difficilement réformable pour
éviter ces travers. Un grand ménage par le vide s'impose.
Il est plus juste de payer une oeuvre après l'avoir
essayée qu'avant, pour pouvoir juger soi-même de sa valeur
et du mérite de l'auteur, et ne pas se trouver floué par
l'achat de quelque chose en fonction de publicités qui
s'avèrent après coup trompeuses.
Il serait le comble du ridicule de prétendre que la culture
et
la création va mourir si on ne paie pas suffisamment les
auteurs. En effet, qu'entend-on par défense de la
création ? Le risque que cette création disparaisse et
qu'on se retrouve sans création peut-être ?
Déjà, même s'il n'y avait plus de nouvelle
création, les créations qui existaient
déjà, mises en circulation, constituent une dose de
culture largement satisfaisante, et en se mettant à la diffuser
plus librement et systématiquement elle apparaîtra
déjà en pratique comme plus abondante qu'à leur
époque même. Dire qu'elles sont en quantité
inacceptablement insuffisante c'est prétendre que la culture n'a
encore jamais vraiment existé et qu'il est indispensable d'en
inventer de
nouvelles si on veut qu'elle commence à vraiment exister. Ce
n'est pas
gentil pour les créateurs du passé.
Il serait bien difficile de justifier le déploiement de la
puissance
publique et toutes les contraintes associées, dans l'unique but,
en fin
de compte, de soutenir précisément la création
d'oeuvres destinées à intéresser
exclusivement un public trop avare et dépourvu de conscience du
bien
social pour accepter volontairement d'en rémunérer les
auteurs à leur
juste valeur. Quelle sorte de culture cela doit être !
Enfin donc, ça sert à quoi de continuer à
développer toujours plus d'oeuvres que la quantité
déjà astronomique en circulation ? Parce que comme toute
activité économique dans un système
économique juste et optimal, une activité ne doit exiger
de rémunération que dans la mesure de sa réelle
contribution au bien commun, c'est-à-dire
précisément de la différence entre le bien
arrivant comme conséquence de son activité, et le bien
qui existerait déjà en son absence. Mais qu'apporte donc
exactement une nouvelle oeuvre par rapport au cas où elle
n'existerait pas ? Apporter la culture ? Parce que sans cette
contribution le public serait privé de culture peut-être ?
Non du tout puisqu'elle existe déjà à profusion.
Ce qui limite la culture du public (si on décide de
désirer une "culture" pour lui), ce n'est pas la quantité
éventuellement insuffisante de nouvelles oeuvres en circulation,
mais bien plutôt le temps qu'il décide d'y consacrer.
Autrement dit, s'il n'y a pas une oeuvre nouvelle à sa
disposition, il ne sera pas sensiblement moins "cultivé" dans la
mesure où il en reste toujours des tonnes d'autres à
disposition. Or, par exemple on peut imaginer que sans telle nouvelle
oeuvre l'auditeur irait profiter d'une autre oeuvre plus ancienne (ou
une autre nouvelle) et verser une obole à son auteur, ce qui
serait bénéfique pour ce dernier, bénéfice
qui disparaît avec l'encombrement de l'oeuvre
supplémentaire. Donc, multiplier les oeuvres c'est atomiser le
public
de chacune, et donner moins d'occasion à chacune de se faire
apprécier et de recevoir ses oboles d'une manière
équitable.
Donc en toute rigueur, la multiplication des oeuvres nouvelles est
nuisible au développement d'une juste et raisonnable
rémunération de chacune d'entre elles.
Il faut donc que les artistes comprennent que, comme tout secteur
économique d'utilité marginale
(au sens économique) limitée, il est nécessaire de
se restructurer en ajustant les effectifs d'emplois aux besoins
réels de la société, et que la diminution de la
rémunération du travail, même s'il paraît dur
de manière transitoire, est le levier juste, naturel et
indispensable qui permet d'accomplir cela.
Il ne restera plus qu'un problème à résoudre: le
développement de bons répertoires de l'ensemble des
oeuvres existantes pour donner de manière juste leur chance aux
oeuvres d'attirer leur public et donc par là leur libre
rémunération. Ces répertoires peuvent aussi se
constituer librement par le web.
Une
vidéo humoristique
La
tragédie du droit d'auteur : article Agoravox
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